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Le nouvel album de Jean-Claude Servais donne lieu à une superbe rétrospective

Par Charles-Louis Detournay le 5 novembre 2020                      Lien  
À l'occasion des 45 ans de carrière de Jean-Claude Servais, et pour saluer son album qui vient de paraître, "Le Loup m'a dit" chez Dupuis, la galerie Huberty & Breyne lui consacre une superbe rétrospective, avec plus d'une centaine de planches réalisées entre 1975 et 2020. Et si le reconfinement ne vous permet pas d'aller les admirer en personne, le site de la galerie pallie à cette contrainte, avec une visite numérique qui vous offre un dépaysement garanti.

Le nouvel album de Jean-Claude Servais donne lieu à une superbe rétrospectiveDans Le Loup m’a dit, le dernier album de Jean-Claude Servais qui vient de paraître chez Dupuis, l’auteur nous offre une belle fable, dans laquelle il démontre comment l’Homme s’est progressivement éloigné de son propre milieu naturel. Une piqûre de rappel pour se souvenir d’où l’on vient afin de mieux comprendre où on en est.

Jean-Claude Servais nous explique l’objectif de ce récit qui ne ressemble à aucun autre de ses albums : « Je suis convaincu que pas mal de lecteurs ne connaissent pas la symbiose qu’il y a pu avoir entre le loup et l’Homme depuis le début de l’humanité. À la préhistoire, je montre comment l’Homme étudie les techniques de chasse du loup, et vice-versa, afin d’arriver à une collaboration au bénéfice des deux espèces. Jusqu’au moment où cela s’est transformé en rivalité : l’Homme a pris le dessus, il est parti à la dérive et s’est éloigné de la nature. Au fil des âges, je prends donc dans cet album le loup comme baromètre de cet équilibre rompu par l’Homme avec l’industrialisation et la connotation maudite que la religion catholique a apposée sur le loup, ces prédateurs inquiétaient l’Homme, car ils n’avaient pas la mainmise sur eux : ils représentent la part de la nature qu’ils ne pourront pas maîtriser. Or il est indispensable que cet aspect sauvage de la nature puisse perdurer. »

La première partie de cet album comporte de magnifiques planches rendant compte de la beauté insoupçonnée de la nature de nos contrées. En dépit des milliers de planches consacrées à sa région et les centaines d’entre elles qui mettent en scène la nature elle-même, Jean-Claude Servais n’a jamais atteint un tel niveau d’empathie. Ce que l’on peut voir comme une déclaration d’amour à la nature a été provoqué par un péril écologique venu menacer le paradis préservé où vivait l’artiste.

"Le Loup m’a dit"

« J’ai la chance d’habiter en Gaume [1], l’une des dernières zones naturelles de Belgique, à la frontière de la France, où nous bénéficions encore d’exceptionnels paysages sauvages et de vastes étendues qu’il faut absolument préserver. Cet album s’apparente à un cri d’alarme que je lance. Un fait déterminant a influé sur ma construction de cette histoire : la Gaume a été envahie de projets éoliens menés par des financiers qui ne sont pas intéressés par l’écologie, mais par l’argent, et qui ne respectent absolument pas la biodiversité, la nature, ni les habitants. Je me suis senti concerné car ils touchaient à mes lieux d’inspiration et j’ai combattu avec les villageois contre ces projets. Ce sera expliqué dans le tome 2 en espérant une prise de conscience des politiques, à savoir que l’économie ne doit se développer aux dépends de la nature et de l’humain, surtout lorsqu’on utilise l’écologie ou la modernité pour faire avaler ces couleuvres. Tant en France qu’en Belgique, nous disposons encore d’une vraie richesse naturelle, et notre devoir est de la préserver avant que cela ne soit trop tard. »

Outre ce passionnant lien entre l’Homme et le loup étudié au fil des âges, Le Loup m’a dit propose une saine reconnexion à la nature, tout en laissant le loup (et d’autres animaux dit « sauvages ») revenir et se réimplanter. Mais n’allez pas penser que ce diptyque soit un brûlot contre l’éolien (une thématique abordée dans le second tome à paraître en 2021), mais il s’agit bien un livre orienté vers la nature. « Ces nouvelles énergies sont nécessaires, cela ne fait aucun doute », assène l’auteur. Mais pas n’importe où, et surtout pas dans les mains de n’importe qui ! »

Jean-Claude Servais, au sein de son exposition à la Galerie Huberty & Breyne, avant le reconfinement.
Photo : Charles-Louis Detournay.

Ce récit se distingue également des précédents car il ne se focalise pas, comme précédemment, sur quelques personnages en particulier. Il présente plutôt des personnages que l’on retrouve au fur et à mesure des époques, conservant leurs caractères et leurs prénoms, pour que le lecteur puisse facilement s’y retrouver. Cet aspect confère au récit le ton d’une fable, ce qui adoucit le message, orienté vers une transmission entre les générations : « Parmi les autres, la Loba se transpose avec tous les personnages de son environnement qui ont vécu ces différentes étapes de l’historique du loup et de l’Homme, nous explique l’auteur. Ce récit reste bien entendu une fable car je saute d’une période à l’autre, mais ce sont là des flashes qui sont déterminants dans l’Histoire de l’humanité. »

La version limitée

Magnifié par les superbes planches dédiées à la nature, Le Loup m’a dit demeure un très beau récit, qui reprend la thématique du loup, déjà abordée par l’auteur dans Lova ou La Tchalette avec les loups-garous, mais ici dans un ton plus réaliste et contemporain, fort d’un propos qui nous touche tous, tout en restant une belle histoire comme Servais sait les réaliser depuis une quarantaine d’années.

Deux versions de cet album sont proposées au public : la version classique et une version limitée à 1500 exemplaires, qui s’enrissent d’une jaquette et d’un frontispice signé par l’auteur. Deux éléments, qui comme une dizaine de planches de l’album, sont présents dans l’exposition que la galerie Huberty & Breyne consacre à Jean-Claude Servais depuis le 29 octobre. Et comme nous allons le voir, cet hommage dépasse largement le cadre de ce dernier album !

Aux prémices d’une oeuvre

« Avec les galéristes, continue à nous expliquer Jean-Claude Servais, Nous avons choisi de parcourir toute ma carrière au gré d’une centaines de pièces soigneusement sélectionnées. Celles-ci égrènent quarante-cinq années de travail : de toutes mes premières planches publiées, jusqu’aux toutes dernières publiées dans "Le Loup m’a dit." »

Dès l’entrée dans la galerie, on découvre quatre planches étonnantes dans leur style, assez différentes de ce que Jean-Claude Servais nous a habitué depuis une quarantaine d’années. Il s’agit effectivement de ses tout premiers travaux publiés, comme il nous l’explique : « Le concours « Carte blanche » du Journal Spirou était ouvert à tous et permettait que de jeunes auteurs y fassent leurs premiers pas. À mon époque, les lecteurs ont ainsi pu découvrir des auteurs comme Frank Pé ou Yslaire. Comme d’autres, mes deux premières pages avaient été refusées par le redoutable rédacteur en chef de l’époque, Thierri Martens. J’avais alors 17 ans, j’étais élève à Saint-Luc à Liège, et c’était un ami qui m’avait fait le lettrage. Pas tendre, Martens m’avait répondu que seuls mes phylactères et mon lettrage étaient professionnels… Et comme je n’avais même pas lettré, il m’avait fallu 15 jours avant d’oser reprendre un crayon. Il fallait donc y croire pour garder la foi ! »

La première publication de Jean-Claude Servais en 1975 dans le "Journal Spirou", qui signait alors Jicé

Volontaire, le jeune Jean-Claude Servais n’a pas abandonné et, finalement, deux premières planches furent publiées dans le magazine, suivies très vite par deux autres avec les mêmes personnages. Faisant partie intégrante de l’exposition, elles permettent de déjà retrouver le style de l’auteur, même si cet encrage plus rond va vite céder la place à un style plus réaliste, débuté tout d’abord avec la série Ronny Jackson pour la collection de Découvertes Dupuis.

Dans ce domaine, l’une des rencontres marquantes fut celle de Gérard Dewamme au service militaire. Avec ce professeur de français, Servais commence Tendre Violette prépubliée dans (À suivre…) et réalise seul dans le même temps La Tchalette.

« Avec Gérard, nous racontions les histoires de nos villages, nous explique Jean-Claude Servais. J’habitais au fin-fond de la Belgique, il n’y avait à l’époque ni bibliothèque, ni Internet pour trouver de la documentation. J’avais réalisé des Histoires de l’Oncle Paul et d’autres courts récits authentiques, mais sans la documentation appropriée, ce n’était pas facile de se débrouiller. Je me suis alors tourné vers ma propre documentation, celle que j’avais constituée avec les années et qui tournait autour des contes et légendes des Ardennes, portée par de vieilles cartes postales. Et hasard, ces thèmes ont plu aux lecteurs, sans doute aux citadins qui ont apprécié cet exotisme rural. »

« Comès a également travaillé dans la même veine, se souvient Servais. Ce qui lui a permis de s’épanouir, car ce qu’il avait réalisé auparavant, comme "Ergün l’Errant", ne lui a pas donné le succès qu’il a connu par la suite. À l’époque, il fallait surtout publier dans le bon support. Initialement, Comès et Pratt pour ne citer qu’eux, ne publiaient pas dans les bonnes revues… jusqu’à (À suivre)… » où j’ai eu la chance d’arriver à 23 ans. J’ai donc pris le train en marche, et ma carrière était lancée. Il fallait que le public soit prêt pour ce type de récit ; je suis arrivé au bon moment. »

De belles rééditions ont été effectuées chez Dupuis ces dernières années : les trois recueils de Tendre Violette qui permettent de profiter d’une magnifique atmosphère dans un magnifique noir et blanc. Si Petite Reine vient d’y être réédité, nous attirons surtout votre regard sur la réédition de l’Almanach, une œuvre ambitieuse mais aussi l’une des moins connues des amateurs de Servais, et que Dupuis vient de rééditer dans très belle mouture, car l’album original avait pâti d’un mauvais papier lors de sa publication dans les années 1980.

« L’Almanach était une somme d’observations de la nature et des Hommes au cours des saisons, de contes et légendes, ainsi que de grands thèmes liés aux différents mois de l’année. J’avais réalisé un gros travail préparatoire pour bien ajuster l’album, afin que telle histoire se déroule à tel moment, de montrer la vie de la campagne et des terroirs, tout en le rendant attractif. Ces douze nouvelles offraient une grosse masse d’informations qu’il fallait calibrer pour que chacune forme un récit complet en seulement douze planches : un vrai défi ! »

D’un outil à l’autre

Une grande étape dans la carrière de Jean-Claude Servais est marquée par l’abandon de l’encre au profit du crayon en 2007. L’accrochage de l’exposition rend magnifiquement ces deux époques, car plutôt que d’aligner les planches dans un ordre chronologique, le galeriste a choisi quelquefois de les rapprocher, afin qu’on puisse les comparer. Elles se distinguent du premier coup d’œil par la taille plus imposante des superbes planches au crayon. Mais d’un autre côté, on s’étonne de la force de cette dernière technique, car l’utilisation du crayon (de la mine de plomb) ne déforce pas les masses de noir que l’auteur a l’habitude d’utiliser.

« À l’époque, on me demandait régulièrement de réaliser de grandes affiches ou de grandes illustrations. Or, la technique des bleus de coloriage était spécifique à la bande dessinée, et dès que je travaillais en dehors de la BD, j’avais des soucis à faire réaliser ces bleus sur base de mes dessins encrés. Et au même moment, j’écrivais aussi le scénario du "Labyrinthe de Durbuy" et j’avais réalisé de grands dessins préparatoires au crayon que le petit éditeur Weyrich a voulu rassembler dans un ouvrage. C’est à ce moment-là que nous avons réalisé des essais de mise en couleurs sur ces crayonnés et nous étions finalement assez contents de ce résultat. De là, je me suis progressivement dit que je pourrais donc adapter cette technique-là à mes bandes dessinées. »

"Orval"

Il ne s’agit pas d’un simple crayon. Au point qu’en les observant, on pourrait croire qu’il s’agisse de trait au feutre, mais bien de la mine de plomb, épaisse et très sèche. Sont exposées également quatre planches du Loup m’a dit qui permettent de bien comprendre la technique actuelle de Jean-Claude Servais : « Je réalise tout d’abord des esquisses plus légères sur un papier différent, que je projette en silhouettant sur l’original, afin de laisser mes lignes de construction sur le brouillon. Il n’est pas possible d’avoir effectivement le trait juste au crayon du premier coup. À l’encre, on peut crayonner, puis effacer les lignes de construction après avoir tracé le net. Certains crayons que j’utilise pour la mise au propre sont tellement gras qu’ils ne peuvent pas s’effacer : je ne peux donc pas me tromper ! »

« Pour obtenir de telles masses de noir, j’utilise du 2B et 4B au point qu’en les comparant comme les galeristes l’ont accroché, on ne voit effectivement pas de différence entre les noirs du crayon et ceux de l’encre, car je charbonne très fort. Avant je rehaussais mes traits de plume avec un pinceau, et maintenant je monte progressivement en calibre de mine jusqu’à finir au 1,1 en 4B. Ces aplats de noir donnent tout le relief au dessin. Je fixe également mon trait au fur et à mesure, car le crayon ne fait que répandre une forme de poudre de mine de plomb sur le papier. Il faut utiliser la laque pour maintenir la finesse du trait et l’atmosphère désirée. Quant à la taille des planches, la plume étant plus fine que le crayon, les nouvelles sont plus grandes. Et puis j’avais envie de changer de mouvement, en adoptant un style plus ample, plus aéré. Je me sens plus libre avec le crayon. »

Entre ces deux techniques, le papier change aussi, pour profiter du grain et de donner de l’épaisseur au trait, tout en absorbant le crayon en faisant office de buvard. Servais joue aussi sur des effets de crayonnés en adaptant les épaisseurs de trait, de 0,3 jusqu’au 1,1 au 4B.

Le vaste cadre de la galerie Huberty & Breyne à Bruxelles se prête parfaitement à présenter ces grandes planches en noir et blanc, notamment les grands formats au crayon, et confére beaucoup de majesté et de puissance à l’ensemble. Un travail qui n’est heureusement pas complètement perdu, car toutes les planches, dessins et illustrations sont visibles en bonne définition sur le site de la galerie, même les pièces historiques qui ne sont pas à vendre. Bien entendu, cela ne remplace pas la proximité du papier, mais cela reste un superbe voyage à réaliser à votre propre rythme, au gré des évolutions graphiques et narratives d’un auteur sans pareil.

Propos recueillis par Charles-Louis Detournay.

(par Charles-Louis Detournay)

Cet article reste la propriété de son auteur et ne peut être reproduit sans son autorisation.

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Code EAN : 9791034747900

À défaut de pouvoir visiter la rétrospective consacrée à Jean-Claude Servais au sein de la galerie Huberty & Breyne à la place du Châtelain, 33 à 1050 Ixelles, admirer les oeuvres sur le site internet de la galerie.

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À propos de Jean-Claude Servais, lire également sur ActuaBD.com :
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Hormis les scans, toutes les photographies, y compris le médaillon et la photo de survol sont : Charles-Louis Detournay.

[1La Gaume est la partie romane de la Lorraine belge, une région historico-géographique formant une entité culturelle, se situant à l’extrême sud de la Province du Luxembourg, au bord de la frontière française.

 
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2 Messages :
  • Servais mérite le Grand Prix d’Angouleme depuis si longtemps.

    Répondre à ce message

  • Servais et Servé ??
    7 novembre 2020 14:09, par Pierre Gabus

    Très bon article sur cet excellent dessinateur et sur sa technique subtile. A la même époque (fin de la période Martens à Spirou), il y avait très épisodiquement un autre dessinateur, excellent lui aussi, qui livrait également des planches pour la rubrique "Carte Blanche" puis sous forme de petit récits dans le journal. Il signait Servé et avait un style humoristique délirant fourmillant de décors minutieux avec des couleurs pleine de punch. Ses personnages étaient toujours les mêmes et s’appelaient Clovis, Roburite et Moloch (ou quelque chose d’approchant). Ils ont même eu l’honneur d’une couverture du journal. Est-ce qu’il s’agit du même Servais signant différemment ses pages humoristiques ou est ce que les deux n’ont rien à voir ?

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