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Pénélope Bagieu au Pop Women Festival : " L’échec et les difficultés forment une vie créative" [INTERVIEW]

Par Romain GARNIER le 20 avril 2023                      Lien  
Au Pop Women Festival de Reims, de nombreuses grandes autrices de bande dessinée étaient présentes. Parmi elles, Pénélope Bagieu. Pour ActuaBD, elle a accepté de revenir avec nous sur son parcours, son processus de création, la polémique concernant l’œuvre de Roald Dahl, la place des femmes dans sa profession, sa dernière bande dessinée publiée - Les Strates - ainsi que sa nouvelle création à venir en duo avec Lola Lafon.

Pourquoi était-il important pour vous d’être ici, au Pop Women Festival, tout jeune festival qui valorise avant tout la création féminine ?

PB : J’aime bien l’idée que cela soit à la croisée de la pop culture et un festival féminin. Je trouve que ce sont deux thématiques qui se rencontrent assez rarement. Par réflexe, dans l’imaginaire collectif, pop culture fait penser aux super-héros. Il s’agit là d’un angle inédit. Deux thématiques qui m’intéressent beaucoup personnellement. Je suis heureuse d’être là.

Pénélope Bagieu au Pop Women Festival : " L'échec et les difficultés forment une vie créative" [INTERVIEW]
"Cadavre exquis" récompensé en 2011 par le prix Fauve SNCF au festival d’Angoulême
© Gallimard

Vous êtes prix Fauve SNCF pour Cadavre exquis en 2011, prix Harvey du meilleur livre européen pour California Dreamin’ en 2018, prix Eisner en 2019 pour Culottées, prix des libraires du Québec pour Sacrées sorcières, décorée de l’ordre des arts et des lettres, trois films adaptés de votre travail, ainsi qu’une série animée adaptée de Culottées. Et tout ça, à seulement 41 ans !

PB : Oui, mais des tas de gens que j’aime font plein de trucs aussi !

Pas trop lourd à porter ?

PB : Non, car ce sont des choses qui arrivent une fois et qui n’ont pas de conséquences. Ce n’est pas comme-ci j’avais un Nobel de physique et que maintenant on comptait sur moi pour faire avancer le monde.

Mais êtes-vous satisfaite de ces prix, de ces succès ?

PB : Oui, carrément ! Je ne vais pas dire le contraire.

"California Dreamin’" a été recompensé en 2018 par le prix Harvey du meilleur livre européen
© Gallimard

Nous avons lu une interview de vous dans laquelle vous dites avoir eu les pires notes à la sortie de votre promo et que l’échec vous avait formé.

PB : Oui, ça c’est vrai. L’échec et les difficultés forment une vie créative. Cela oblige à se poser la question de savoir pourquoi on fait les choses. Quand c’est difficile, que le chemin se présente mal et que tous les signaux encourageaient plutôt à laisser tomber. Quand on se dit « qu’est-ce que je veux ? ». Est-ce que je veux y arriver ? Est-ce que je veux pouvoir continuer à le faire toute la journée parce que c’est ce que j’aime faire ? Il est bien de vite se rendre compte que ce n’est pas la réussite l’objectif. Moi, je me suis dit que j’aimerais pouvoir dessiner toute la journée et que cela me rapporte de quoi vivre pour ne pas avoir à faire un autre travail à côté. C’est ça mon objectif. Et quand c’est ça l’objectif, ce n’est pas grave si on n’a pas de bonnes notes à sa promo ou que les gens disent « moi je trouve que ce que tu fais, c’est de la merde ».

Vous êtes l’autrice de l’adaptation de Sacrées sorcières en bande dessinée. Avez-vous suivi la polémique concernant la réécriture, l’adaptation de certains mots de l’œuvre de Roald Dahl ? Qu’en pensez-vous ? Vous êtes vous vous-même posée ces questions de « comment me comporter vis-à-vis du texte » ? Dois-je le retranscrire tel quel ou dois-je le modifier ?

PB : Quand on fait une bande dessinée, on est obligé de se poser cette question là. Ce n’est pas comme quand on illustre un texte. Il faut réécrire l’histoire. Donc de toute façon, cela ne va pas être la même histoire. Elle va être écrite par quelqu’un d’autre à une autre époque. Donc l’histoire est changée par rapport au roman. Et ce n’était même pas dans un questionnement de « est-ce que je peux le laisser comme ça ? ». Je m’en fous. Je veux raconter ma version.

Extrait de "Sacrées Sorcières" de Pénélope Bagieu, bande dessinée récompensée en 2021 du Prix des libraires du Québec - BD Jeunesse
© Gallimard

Pour moi, faire une adaptation en BD d’un livre existant, c’est comme raconter une blague avec ses mots à soi. Je sais que mes blagues sont plus marrantes quand je les raconte avec mes mots. Cela ne sert à rien de recopier « sujet, verbe, complément » de la façon dont on me l’a racontée. Je la connais. Et maintenant, je la raconte.

Par exemple, il y a un personnage qui ne m’intéressait pas dans le roman de Roald Dahl, le personnage de Bruno, qui est le petit garçon qui devient une souris avec le héros. Or, le seul ressort comique est le fait qu’il soit gros. Même quand j’étais petite, il ne me faisait déjà pas tellement rigoler. Je me suis donc dit, j’aimerais bien qu’il dégage. Mais qui, le héros, pourrait-il avoir comme copain ? J’aimerais qu’il ait une copine, tant qu’à faire. Donc j’ai écrit un personnage de fille qui me paraissait pertinent dans mon histoire, après je lui ai inventée ses parents.

Mais il est certain que j’étais obligé d’avoir une lecture critique de certaines choses qui sont une autre époque. Sacrées sorcières, c’est un roman qui a été écrit quand je suis née. Là ce n’est plus la même époque. Il y a des choses qui ne correspondent plus à la réalité des enfants de maintenant. Tout simplement.

Extrait de "Sacrées Sorcières" de Pénélope Bagieu
© Gallimard

Je ne me prononce pas par rapport à ce qui a été réalisé comme modifications du texte de Roald Dahl, aujourd’hui. Mais quand j’écris une histoire, je me demande si elle est adaptée à ce que moi j’ai envie d’écrire. Donc cela me paraissait logique de faire tous les changements nécessaires. Les parents ne sont plus pareils. Le rapport aux enseignants n’est plus le même...je l’ai lu quand j’avais huit ans. Et je ne voulais pas que des gens qui ont huit ans aujourd’hui le lisent en se disant « C’est nul ! Ce n’est pas marrant. On y croit pas du tout. Aucun enfant ne parle comme ça ». Donc il fallait le faire.

Pour ce qui est des adaptations, actuellement, des passages de l’œuvre de Roald Dahl, je n’ai pas suivi à quel point cela a été fait par les ayants droits de Dahl. Mais si c’est eux qui ont voulu le faire, je trouve que c’est très bien. Parmi les ayants droits, il y a Luc, le petit-fils de Roald Dahl. C’est avec lui que j’ai travaillé pour adapter Sacrées sorcières. Donc je vois très bien les questionnements qui peuvent le traverser, le fait d’adapter l’œuvre de son grand-père qui commence à être datée et d’avoir envie qu’elle soit toujours au goût du jour, qu’elle parle toujours aux enfants d’aujourd’hui. Cela reste un auteur qui compte énormément dans le cœur des adultes qui ont été des enfants, qui ont lu Roald Dahl.

Si dans 80 ans, mes arrières-petits-enfants disaient « Aïe, les trucs qu’a écrits mamie, aujourd’hui ça a quand même pris un sacré coup de vieux », je leur ferais confiance pour qu’ils ne trahissent pas mon œuvre. En revanche, si jamais c’est une pression qui vient d’un éditeur ou un comité de lecteurs, c’est encore autre chose. Quand les gens qui tiennent le texte disent qu’ils ont envie de lui permettre d’accéder aux enfants, cela ne me choque pas.

"Les Strates" de Pénélope Bagieu au format Moleskine
© Gallimard

Votre dernière bande dessinée s’intitule Les Strates. Pourquoi avoir fait le choix du noir et blanc, de conserver le crayonné pour évoquer votre vie.

PB : J’ai plutôt fait le choix de ne pas transformer du crayonné noir et blanc en un format livre. Au moment où j’avais des trucs que j’avais gribouillés dans mon coin en noir et blanc, je me suis posé la question de les mettre au propre et en couleur pour en faire un livre ou de laisser cela comme ça. Le choix a été fait de laisser en l’état. Tout a été fait à différentes époques.

Dans Les Strates, il y a des histoires que j’ai dessinées il y a dix ans, cinq ans, deux ans, trois mois avant que le livre ne soit terminé. Et de manière toujours très spontanée. À aucun moment, jusque là, en me disant que je les mettrais dans un livre un jour. Je les avais donc faites de manière très organique, c’est-à-dire dans des carnets qui traînent. Précisément parce que je me disais que tout cela, je n’en ferais pas un livre. Je pouvais donc faire les choses de la manière la plus brute et simple possibles.

C’est à la toute fin que je me suis dit qu’il était bête de ne pas en faire un livre. Et je ne voulais pas transformer ces dessins. Parce qu’ils ont été faits comme ça. Puis quand je me suis dit que ce serait un livre, j’avais en tête d’en faire aussi un objet, que cela ressemble à un carnet Moleskine. Ce qui renforçait en moi l’idée qu’il ne fallait surtout pas que je touche à la forme.

J’ai quand même retapé certaines planches parce qu’il existait un problème d’homogénéité. Certaines histoires avaient été faites il y a dix ans. Et Dieu merci, mon dessin a un petit peu évolué en dix ans. Pour le reste, cela aurait été bizarre de me dire « Aller, maintenant je vais le refaire au propre et en joli parce que maintenant c’est du sérieux, c’est un livre ».

Extraits de "Les Strates", crayonné en noir et blanc
© Gallimard

Vous voyez votre passé en noir et blanc ?

PB : (Sourire) C’est comme ça que j’aime dessiner le plus. Pour moi, cela aurait été comme me filmer chez moi en train de raconter des trucs hyper personnels, hyper forts en jogging. « Ok ! Maintenant, on la refait, tu vas te maquiller, mettre une belle robe parce qu’il y a des gens qui arrivent ». Non ! Ce n’est pas ce qu’on avait dit. On avait dit que c’était moi, et moi c’est du crayon en noir et blanc.

Vous dites que c’est vous. Est-ce qu’il n’a pas été difficile, lorsque vous avez décidé d’en faire un livre, d’y mettre tout. Notamment la question des abus. Pour vous, n’y avait-il aucun problème ou était-ce ardu de l’intégrer à cet ensemble ?

PB : Non, ce n’était pas difficile. À partir du moment où on a dit qu’on en faisait un livre, j’avais en tête tout ce qu’il y avait dedans. Ce qui est davantage un grand pas, une grande respiration à prendre, c’est de se dire que les gens que j’ai dessinés vont se voir. Ça c’est un vrai truc. Quand on se dit « Ah mais du coup, ma copine de quand j’étais en cinquième, ma maman, truc »...vont se voir.

C’est toujours très déstabilisant pour les gens de se voir dessinés en BD. Car c’est une toute petite parcelle d’eux, où on grossit le trait, et on les dessine comme nous on les voit. Vraiment, les gens ne sont jamais contents. Je l’ai quand même fait lire en entier à ma sœur avant publication. Comme elle est très présente dans mes histoires...et elle était tellement contente. Car la plupart des souvenirs que je convoque, ce sont des choses qui lui en rappellent aussi. C’était un peu comme une capsule-temps pour elle. Si ma sœur m’avait dit « attends !, il faut qu’on parle, c’est n’importe quoi !, cela ne s’est pas du tout passé comme ça !, en plus c’est hyper insultant pour machin... », je pense que j’aurais tout censuré.

Extraits de "Les Strates", crayonné en noir et blanc
© Gallimard

Pour le reste, une vie d’une femme de quarante ans, c’est jalonné de plein de choses, et universellement, malheureusement, c’est aussi jalonné d’agressions à différents degrés. Ce serait mentir que de les enlever. « Tadam ! Voilà, c’est ma vie. J’ai enlevé une chose, saurez-vous deviner laquelle ? ». On se doute très bien laquelle. Cela aurait été artificiel et tricher d’enlever ça et d’essayer de faire croire que ce n’était pas dans la vie. Plusieurs fois. Car ça l’est.

Justement. Ces pages dans lesquelles vous êtes victimes d’abus, vous les construisez avec une narration en double colonne. Pouvez-vous nous expliciter ce choix.

PB : Je raconte effectivement deux agressions qui sont à des niveaux différents, mais qui se répètent. Qui témoignent du poids de la culpabilité inversée et de la honte. Qui fait que l’on ne parle pas. Même quand on en a l’occasion. En l’occurrence, je raconte que quand j’étais petite à une pyjama party, et plus tard quand j’étais étudiante en restant dormir après une fête chez un mec. Les phénomènes se répètent. Dans les deux cas, quand j’ai eu l’occasion d’en parler, je n’ai pas voulu parce que je me suis dit que c’était peut-être de me faute.

À l’origine, je voulais seulement choisir une de ces deux histoires. Puis je me suis dit que c’était intéressant de mettre en avant le fait que c’était la même et qu’elle se répétait avec les mêmes mécanismes. Je pense que j’aurais pu en faire quatre, des colonnes. Le temps ne guérit absolument pas ces choses intériorisées que connaissent, je pense, beaucoup de personnes qui sont victimes d’agressions, hommes et femmes. Ce que je voulais dire, c’est que malheureusement, la vie ne sert pas forcément de leçons. Il y a parfois une impression durable, de choses que l’on arrive pas à casser.

Extraits de "Culottées" consacré à Joséphine Baker
© Gallimard

Restons sur votre processus de création, mais avec d’autres de vos ouvrages. Quand vous avez élaboré Culottées, est-ce que vous pensiez à vos lecteurs et lectrices ou votre démarche était strictement personnelle, et tant mieux si celle-ci a rencontré un public ?

PB : De manière générale, je pense que les auteurs et autrices de BD font un livre pour répondre à une envie personnelle, toujours. Que ce soit de la curiosité ou une obsession. C’est un peu comme cela que ça marche. Cela permet de réparer une obsession. D’en finir avec un sujet. J’ai l’impression d’avoir fonctionné comme ça pour tous mes livres. Pour Culottées, comme j’avais fini Carlifornia Dreamin’ avant et que je m’étais rendue compte que j’adorais faire de la biographie, je m’étais dit que cela me permettrait de régler la question de la biographie une bonne fois pour toute.

J’ai ainsi passé un an à lire des biographies, faire des recherches, c’était formidable. Et effectivement, cela a rencontré beaucoup de succès. Cela m’a confirmé un truc que je pressentais un peu. Je pense qu’il y a une symétrie chez moi, assez automatique, entre la satisfaction d’un truc très personnel et le succès que cela rencontre. J’ai l’impression que plus j’écoute cette voix-là, plus cela rencontre des gens. J’ignore si c’est parce que l’on sent une sincérité, un enthousiasme, si c’est parce que je travaille mieux parce que j’y mets plus de cœur que sur quelque chose qui me fait moyennement envie.

Intégrale de "Culottées" - Tirage de luxe
© Barbier & Mathon

C’était surtout ça ma satisfaction avec Culottées, quand j’ai vu que cela marchait bien. Je me suis dit que j’avais tellement bien fait d’écouter cette envie. Sur le coup, je n’ai pas trop douté, mais quand je l’avais annoncé à mon éditeur, il m’a dit « du coup ce ne sera que des femmes ? Tu ne vas pas mettre genre un mec dedans ? ». Non, pas du tout. Cela sera super comme ça. Si je ne m’étais pas écoutée, les choses se seraient peut-être passées autrement. Après, comme il a bien marché et que j’ai eu une très longue promo - j’y ai passé trois ans - cela ne m’inquiétait pas. Au lieu de me dire, il faudrait peut-être que je me remette à bosser, que je fasse quelque chose, le problème était qu’il n’y avait rien qui me faisait envie.

Et je sais qu’à un moment, il y aura une histoire où je vais me dire « oh ! Je suis à fond. J’ai trop envie de faire ce truc là ». Cela voudra dire qu’il faut y aller et ne pas chercher à se précipiter avant sur un truc qui me fait dire « pourquoi pas ». Parce que cela ne marche pas quand je me dis « pourquoi pas ». Puis cela m’emmerde et je mets des années à le faire. Puis cela ne marche également pas sur les lecteurs.

Série animée "Culottées", épisode consacré à Nzinga, reine de Ndongo et de Matamba
© Silex Films

Alors que j’étais en pleine promo de Culottées, mon éditeur – on le salue ! - il me dit « tu te souviens, je t’avais dit il y a des années qu’on travaillait en souterrain sur cette histoire d’adaptation de BD de Roald Dahl, es-tu toujours partante ? Si oui, pourrais-tu commencer maintenant ? ». Je me suis dit, ça c’est mon appel ! « Les Dahl disent que tu peux choisir celui que tu veux. Cela pourrait être bien que tu fasses Mathilda ». Non ! Sacrées sorcières, c’est le meilleur ! Il faut que cela soit Sacrées sorcières ! (rires). J’étais à bloc dès le lendemain. J’avais hâte, tous les jours. Cela me protégeait même du doute. Je ne peux pas me planter, c’est tellement cool d’être en train de le faire. Par contre, j’étais triste quand je l’ai finie. Et maintenant, je suis toujours à la recherche de cela, de cette sensation-là.

Et cette sensation, cette flamme sacrée, vous l’avez trouvée en ce moment ?

PB : (rires) Oui, j’ai commencé une nouvelle BD depuis quelques mois. Là je suis dans la phase de... dans ma valise, là ! J’ai de quoi travailler au cas où ce soir, en rentrant après les dernières rencontres, j’aurais une petite heure pour bosser. Je suis à fond. C’est vraiment un état que j’aime bien...C’est une BD dont je n’ai pas écrit le scénario, que j’écris avec une romancière que j’aime énormément, qui s’appelle Lola Lafon.

Extrait de "Stars of the Stars", une des rares collaborations de Pénélope Bagieu avec un(e) autre auteur/autrice
© Gallimard

Vous n’êtes donc pas seule. S’il y a eu une collaboration avec Joan Sfar et une avec Boulet, pour le reste, votre œuvre se conjugue avant tout au singulier. Est-ce parce que qu’il est difficile de partager cette flamme.

PB : (rires) Un grand sujet ! Je trouve que c’est très, très dur. Il est même arrivé plusieurs fois que je me jure que je ne le referais jamais. J’aime écrire seule. S’il y a de jeunes auteurs ou autrices qui nous lisent, ce qu’il faut pour une collaboration réussie - cela prend des années, du temps - c’est de réussir à identifier la partie que l’on aime faire le plus dans une BD.

Je m’explique. Je connais des dessinateurs de bande dessinée, ce qu’ils aiment, c’est le dessin pur. Ils aiment passer du temps à faire de la documentation, par exemple sur les costumes. Ils adorent passer une plombe à faire une belle image. Le scénariste qui leur faut, c’est quelqu’un qui leur délivre une histoire mise en scène et eux ils peuvent se dirent qu’ils vont se faire trop plaisir sur tel ou tel décor. L’expérience m’a appris que je n’étais pas cette personne.

Ce que j’aime, c’est la mise en scène. J’aime faire les dialogues, les petites expressions du visage, le découpage des actions. Tout cela, c’est mon truc. Du moment que je trouve une collaboration dans laquelle d’emblée, un peu comme dans un couple, j’arrive et je dis « voilà mes limites. Ce que j’aime c’est la mise en scène. Si tu me laisses la mise en scène, je fais ce que tu veux, tu peux m’inventer n’importe quelle histoire. Si je la trouve bien ». C’était ça qu’il fallait que je trouve. Il fallait que j’arrive à trouver ma place dans un binôme où je me dis que la personne avec laquelle je travaille m’apporte quelque chose. Que seule je ne pourrais pas faire.

Couverture de "Stars of the Stars"
© Gallimard

En l’occurrence, cette histoire qu’on est en train de faire avec Lola, romancière dont j’admire le travail - elle me prend aux tripes quand je lis ses livres, je la trouve tellement intelligente - je me dis que je bénéficie de son histoire. Pour autant, elle ne pourrait pas le faire sans moi. J’apporte aussi quelque chose. Il faut comprendre sa valeur à soi et se dire que ce n’est pas un service qu’on me rend de faire un livre avec moi.

Ce n’est pas non plus moi qui me compromet à faire un truc alors que j’aurais été bien mieux toute seule. C’est donc bien comprendre ce que chacun y gagne. J’adore aussi faire des livres toute seule parce que j’adore tout contrôler de A à Z - de manière générale dans la vie - alors quand on fait un livre, encore plus. On est Dieu quand on fait une BD. On décide de tout, des gens, de comment il parle, de la couleur du ciel, de l’histoire et personne ne vient rien nous dire. Pour quelqu’un qui aime le contrôle, la bande dessinée, c’est le rêve.

Sauf si on a un éditeur très tâtillon qui arrive à…

PB : Je n’entends plus très souvent parler d’éditeur qui vienne se mêler du travail de création. Quand je m’adresse à mon éditeur, c’est par exemple pour lui demander de regarder mes 40 pages que je viens de faire. C’est lui qui me dit « tiens, à tel endroit on se fait un peu chier », là je lui dis merci. Parce que c’est moi qui ai demandé. Il n’y a plus beaucoup d’éditeurs qui lisent et qui disent « voilà la liste de ce que j’aimerais que tu changes ». En France ! C’est un truc d’éditeurs français. J’ai bossé avec des éditeurs américains, un peu avec des éditeurs japonais, et j’ai découvert que c’est en France que les éditeurs laissent les auteurs faire ce qu’ils veulent. C’est vraiment un truc de Français. Partout ailleurs, c’est le boss, l’éditeur.

Comme le producteur de films aux États-Unis…

PB : Qui a le cut de fin, voire carrément qui te dit « j’aimerais bien que tu me fasses une histoire qui soit pour des gens qui ont à peu près la vingtaine, il faudrait que l’héroïne soit urbaine, on aimerait bien qu’à un moment il y ait un chat – parce que les gens aiment bien les chats ». Et qu’après, l’auteur dit « c’est parti ! ». Il doit y avoir une autre satisfaction à créer des choses dans la contrainte...mais pour un auteur français... Il claque la porte ! Il part avec sa grande écharpe en disant « mais moi je suis un artiste, Monsieur ! » (rires). Cela n’existe pas chez nous, mais dans des pays, c’est comme ça.

Extrait de "Culottées" sur Nzinga, reine du Ndongo et du Matamba, qui résista à la colonisation portugaise
© Gallimard

Vous parliez, tout à l’heure, des trente femmes choisies pour Culottées. Vous êtes plusieurs aujourd’hui à déterrer le matrimoine, afin de replacer les femmes à leur juste place dans l’histoire de l’humanité. Que cela soit vous avec Culottées, Catel avec ses biographiques dessinées ou encore Camille Paix avec son ouvrage illustrée Mère-Lachaise, 100 portraits pour déterrer le matrimoine funéraire. Vos culottées, vous les connaissiez déjà ou il vous a fallu faire des recherches ?

PB : Je connaissais une bonne grosse moitié. Mais je ne les connaissais pas à ce point. Quand je me suis mise à faire cette liste, tout d’un coup, elles sont apparues. C’est comme ce que disait Titiou Lecoq [à une rencontre lors du Pop Women Festival]. S’il y a des endroits où l’on est jamais allée regarder, alors on ne les a jamais trouvées. Mais si on va regarder, on les trouve toujours.

Je regardais un documentaire sur un metteur en scène, puis je me suis dit « mais dis donc ! Son assistante metteuse en scène, elle a l’air dingue ». Je me suis alors dit, en fait, il y en a absolument partout. Le job de ceux qui écrivent et dessinent, c’est de tirer le fil. On voit les fils qui dépassent et ont les met dans un livre. Ce sont désormais des personnages. J’ai fait une histoire, j’ai romancé. Mais en réalité, elle était là depuis le début. Ce qu’on fait nous, c’est de dire qu’il y a une histoire.

Dans les Culottées, je parle d’une femme qui se nomme Giorgina Reid. Il s’agit d’une vieille dame qui pendant toutes ses années de retraite a retapé la côte d’un phare pour éviter qu’il parte avec l’érosion. C’est une histoire. Une histoire extraordinaire. Mais ce n’est pas un personnage historique. Elle n’a pas dirigé un pays, elle n’a pas été reine, elle n’a pas inventé un vaccin, mais elle a fait un truc de dingue. Une histoire extraordinaire qui me fait pleurer à chaque fois que j’en réentends parler. Mais c’est une vieille dame avec sa brouette. C’est notre boulot de dire oui, mais c’est une histoire !

Visuel de l’adaptation en série animée des albums "Culottées"
© Silex Film

La série animée Culottées a t-elle été adaptée dans d’autres pays que l’espace francophone ?

PB : Je sais qu’elle a été diffusée à la télévision publique dans d’autres pays. Je le sais parce qu’au Portugal, il y a un comité de parents qui a demandé la déprogrammation de Culottées à la télévision publique. Et qui l’a obtenue. Ensuite, un autre comité de parents a milité pour que cela revienne, a affirmé que la situation était scandaleuse, et la chaîne l’a alors reprogrammée. C’est comme ça que j’en ai entendu parler.

Je pense qu’ils devaient viser les épisodes comme ceux de Thérèse Clerc, qui était une militante pour l’avortement et qui réalisait des avortements dans sa cuisine. Des gens ont dit que les enfants n’ont pas à voir ça à des horaires de grande écoute, que ce n’est pas le rôle de la télévision publique que de montrer des horreurs pareilles. Du coup cela avait été déprogrammé. Et moi, je m’étais dit de manière très cynique, comme d’habitude, quel pub incroyable ! (rires). Bon évidemment, j’avais envie de foutre des patates dans les murs. Mais je m’étais dit que cela prouvait qu’il y avait encore des gens qui sont prêts à perdre du temps, à faire des petits comités. Tant que ces gens existent, nous on a raison d’exister.

Rencontre croisée entre Catel et Titiou Lecoq au Pop Women Festival
© Romain Garnier

L’autobiographie, la vulgarisation scientifique, la biographie dessinée, la déconstruction des faits sociaux, le déterrement du matrimoine, la bande dessinée jeunesse – en plein renouveau – autant de manière de faire de la bande dessinée qui est aujourd’hui, généralement, un succès, à la fois populaire et/ou critique. Les femmes sont nombreuses aujourd’hui à être représentées dans ces domaines. Les femmes ne seraient-elles pas à la « mode » ?

PB : Je pense qu’il y a une mode, comme disait Titiou Lecoq, de la table chez les libraires. Mais là où ce n’est pas une mode, c’est que la porte s’était entrouverte et un flot de milliers de femmes est arrivé et a défoncé la porte. Et le flot continue encore. Il y a encore des dizaines de milliers de gens qui vont entrer parce qu’ils disent qu’ils ont une superbe histoire et qu’ils peuvent enfin la raconter. Peut-être que ce sera moins premier degré, ce sera moins « un livre sur les femmes ». Mais le fait que les femmes aient voix au chapitre, ce n’est que le début.

Par un phénomène mécanique très simple, il y a toutes celles qui avant avaient des histoires et qui maintenant vont les faire – on l’a observé dans le cinéma. Après, ce qui se crée, c’est une génération de plus jeunes filles qui se disent qu’elles aussi elles peuvent le faire. Là, c’est comme un deuxième tronc qui a poussé sur l’arbre et qui va continuer à grandir. Ce n’est pas une petite branche sur l’arbre.

Je l’observe aussi, dans une moindre mesure, dans les courriers de mes petites lectrices, parfois très jeunes, qui m’écrivent avec des dessins très mignons, qui m’écrivent des BD. Et j’admire le détachement avec lequel elle le font : « Ah oui, au fait, plus tard, je ferai de la BD ». Quand j’étais petite, pour moi, quelqu’un qui faisait de la BD, c’était un mec qui fumait des roulés sur une table inclinée. C’était Gotlib. Je ne m’imaginais donc même pas qu’il pourrait y avoir des femmes. Or aujourd’hui, il y a une génération pour qui c’est totalement un métier.

Couverture de "Le grand vide" de Léa Murawiec. Une création d’une jeune autrice qui a impressionée Pénélope Bagieu

La perception de la création au féminin a incontestablement beaucoup évolué dans la bande dessinée. Pour la seule année 2022, il y a eu le Grand prix d’Angoulême pour Julie Doucet, le prix Jacques Lob pour Marguerite Abouet, le prix de l’ACBD jeunesse pour Léonie Bischoff, prix des libraires de bande dessinée pour Aimée de Jongh, entrée de Catherine Meurisse à l’Académie des Beaux-Arts. Cette année, 7 femmes ont été récompensées par un fauve d’Angoulême, que ce soit le prix spécial d’Anouk Ricard ou Manon Debraye pour le prix Druillet. Tout cela sans compter les succès d’Alison Bechdel en librairie, la revalorisation de l’œuvre de Nicole Claveloux à travers de belles rééditions, ou les percées de la jeune génération comme Léa Murawiec ou Claire Fauvel. Pensez-vous qu’on est bien partis pour une pleine reconnaissance de la création féminine en bande dessinée ?

PB : On est bien parti. Deux choses toutefois. Les récompenses institutionnelles sont un glaçage sur le gâteau, qui est très important, mais le nerf de la guerre, c’est le succès commercial. Donc, ce qu’il faut surtout noter, c’est que les femmes ont vendu beaucoup de livres. Après coup, les institutions s’alignent. Mais surtout, ce qui motive derrière, ce sont les éditeurs qui se disent qu’il y a un potentiel économique, qu’ils sont prêts à mettre du fric dessus, et que par conséquent les femmes sont payées pour travailler.

Parce que la bande dessinée, c’est un métier qui est très précaire, alors même que la bande dessinée est un des secteurs de l’édition qui génèrent le plus d’argent. Là, on se dit, mais où est l’argent ? J’ai ma petite idée...

En tout cas, le fait que des femmes fassent gagner de l’argent dans la bande dessinée, c’est là l’essentiel. Par exemple, Dans la combi de Thomas Pesquet, qui a été un énorme succès, mène des éditeurs à se dire que oui, une bande dessinée scientifique faite par une femme, ça cartonne. J’ajouterais que le gros de ce mouvement, de cette lame de fond vient de la jeunesse, des jeunes autrices. Elles ont une production qui est d’une qualité assez extraordinaire. On sent qu’elles ont beau publier très jeune, on sent qu’il y a une réflexion qui est en place depuis des années, qu’il y a de la BD qui est lue depuis très longtemps. Une bande dessinée qui s’inspire de choses piochées à droite, à gauche. Ce qui fait qu’elles ont déjà une maturité dans l’écriture et une maturité dans le graphisme qui prenaient vingt ans avant.

Le cas de Léa Murawiec est parlant. C’est extraordinaire ce type d’album chez une autrice si jeune. Tout cela va accélérer le travail. Vous savez, je ne le fais pas exprès, je ne me dis pas que je vais acheter que des BD faites par des jeunes femmes, mais les BD que j’ai trouvées les meilleures l’an dernier, c’est avant tout celles faites par des jeunes femmes. Dans l’originalité du point de vue, du propos. Ce que je lis maintenant est meilleur que ce que je lisais il y a dix ans. C’est donc logique qu’elles aient plus de prix.

Couverture d’une intégrale de "Les Dingodossiers" de Gotlib et René Goscinny, un condenscé d’humour qui a marqué Pénélope Bagieu
© Dargaud

Vous dites que pour ces jeunes femmes, c’est naturel d’être autrice de bande dessinée. Vous, comment vous êtes vous construite votre culture de bande dessinée ? Était-ce avant tout des hommes ou est-ce que Florence Cestac, Claire Bretécher, Nicole Claveloux ont été des références ?

PB : Alors, surtout, j’ai une construction qui ne s’est pas faite par la bande dessinée. Je n’en lisais pas. En fait si, je lisais Les Dingodossiers, je trouvais que c’était extraordinaire. Je me disais « comment quelqu’un peut-il être aussi drôle et savoir aussi bien dessiner ? ». Et je m’en suis rendu compte bien après, comme plein de gens de ma génération, que j’ai été construite par Tom-Tom et Nana. J’ai été construite par Bernadette Després. Une longévité incroyable pour une série en bande dessinée. Je ne savais pas que cela avait été fait par une femme. Parce que quand on est un enfant, on s’en fout complètement des auteurs. Pour moi, c’était la BD de ma vie. On lui doit vraiment toutes énormément. Mais je n’aimais pas particulièrement la BD. Chez moi, il y avait les Tintin de mon père et ça me gonflait. J’aimais les dessins japonais. Plus tard, je voulais faire Les Chevaliers du Zodiaque.

Couverture du tome 26 de "Tom-Tom et Nana - Tremblez carcasses !"
© BD Kids

Est-ce que maintenant que vous êtes autrice de BD, vous ne vous dites pas : tiens, est-ce que je ne rattraperais pas mon retard ?

PB : C’est ce qui s’est passé après, bien sûr. Je ne lisais pas de BD enfant, mais j’en ai lu de manière boulimique les quinze dernières années. D’ailleurs, ce n’était pas pour rattraper mon retard. Je n’ai toujours pas lu Tintin. C’est que je ne me force pas en me disant qu’il y a un patrimoine. J’en ai lu deux-trois, je vois ce que c’est et je trouve ça chouette. Je ne déteste plus. Mais il est trop tard pour ce que cela me laisse une impression qui change ma vie.

En revanche, j’ai lu en même temps des choses qui étaient contemporaines, des choses plus vieilles, j’ai pris le train en marche, et je l’ai fait sans pression. J’ai lu les BD que je trouvais bien. En l’occurrence, quand j’ai vraiment commencé à lire de la BD, c’était parce que moi je commençais à en faire. Et qu’il n’est pas possible d’évoluer dans ce milieu sans lire...on est en dédicaces, on est à côté de gens, on regarde ce qu’ils font. J’ai commencé un peu à me cultiver comme ça.

Donc j’ai découvert toute la BD de l’Association. J’ai trouvé ça super, j’ai compris que la BD ce n’était pas que le genre Tintin. J’ai tout bouffé. Ensuite, je me suis dit que les Américains faisaient des trucs supers. Pareil. Et cela a été un plaisir incroyable que de me dire qu’il va me falloir une vie entière pour lire tout ce qui est merveilleux. Et qu’en plus il continue de sortir des choses merveilleuses. Du coup, je continue à acheter énormément de BD qui sortent. Non pas dans un souci d’être au courant de ce qui sort, mais parce que j’adore lire et conseiller des BD.

Couverture de "Le pois des héros" de David Sala
© Casterman

Justement ! Nous vous avons déjà vue vous adonner à cet exercice de conseil en direct sur instagram et nous souhaitions vous proposer de conclure l’interview par cet exercice. Si vous aviez trois bandes dessinées récentes à conseiller, qu’il faudrait absolument lire, lesquelles conseilleriez-vous ?

PB : Le poids des héros de David Sala. Quelle merveille ce livre ! Intelligent, sublime, ça continue de nous hanter des semaines après l’avoir fini. Je n’ai pas arrêté d’y penser ensuite. C’était vraiment dingue.

Perpendiculaire au soleil de Valentine Cuny-Le Callet [qui a reçu le prix Artémisia]. Tout en noir et blanc avec de la gravure. Magnifique ! Superbement écrit. Encore une brillante jeune autrice !

Les Pizzlys de Jérémie Moreau, grand jeune auteur. On se dit mais où s’arrêtera t-il ? Renouveau à chaque livre, là en plus, ses couleurs ! Mais comment a t-il pu obtenir des roses pareils ? C’est tellement beau. C’est hyper intelligent, c’est malin. J’ai pleuré. C’était sublime.

J’ajouterais Animan d’Anouk Ricard. C’est extraordinaire. Comme toujours avec Anouk Ricard. C’est la seule personne qui me fait physiquement pleurer de rire. Je peux plus m’arrêter. Elle est tellement drôle.

Extraits de "Les Pizzlys" de Jérémie Moreau
© Delcourt

(par Romain GARNIER)

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13 Messages :
  • "Je ne me prononce pas par rapport à ce qui a été réalisé comme modifications du texte de Roald Dahl, aujourd’hui. Mais quand j’écris une histoire, je me demande si elle est adaptée à ce que moi j’ai envie d’écrire. Donc cela me paraissait logique de faire tous les changements nécessaires."

    Je ne comprends pas le sens de la seconde phrase. Elle parle de ce qu’elle écrit comme autrice ou d’écrire une adaptation ?

    En revanche, avec le dernier mot "nécessaires", Pénélope Bagieu se prononce sur les modifications apportées au modifications du texte de Roald Dahl. Et la suite de ses explications ne fait que démontrer qu’elle est pour la modification des textes pour des raisons strictement commerciales.

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  • Elle est un peu gonflée de parler d’échecs quand la plupart des auteurs n’ont pas le 10e du succès qu’elle a. C’est comme la fois où elle a fait des stories facebook pour se plaindre des pénuries de papiers, ce qui allait retarder l’impression de son livre à...80000 exemplaires. Quand la plupart tirent à trois-quatre milles. C’était vraiment déplacé. Un peu déconnectée Pénélope ?

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    • Répondu le 20 avril 2023 à  13:16 :

      Vous n’avez lu que le titre de l’article… dès le début elle est questionnée sur ses échecs quand elle était étudiante, pas sur ses échecs comme auteure.

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      • Répondu le 20 avril 2023 à  23:19 :

        Eh quand bien même, pourquoi devrait-elle avoir honte de son succès ? Elle a certainement connu des échecs comme tout le monde avant d’arriver là où elle est. Il y a un mauvais esprit aujourd’hui en France, un ressentiment qui vise les personnes qui réussissent. En sport on appelle ça être mauvais joueur et en général ça ne mène nulle part. Par ailleurs il n’y a pas que le chiffre des ventes qui constitue une source d’épanouissement artistique, loin de là. Réussir à faire un truc singulier qui n’appartient qu’à soi, c’est déjà très bien. Interview plutôt intéressante par ailleurs, et pourtant je ne suis pas spécialement un fan.

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  • J’aime bien l’idée d’ "d’adapter une œuvre qui commence à être datée et d’avoir envie qu’elle soit toujours au goût du jour ". Important le goût du jour. Qu’est-ce qu’on s’embête avec des vieux trucs qui sont plus de notre époque, on n’a plus qu’à tout réécrire. Pourquoi on se ferait suer à essayer de comprendre des vieux trucs tout ringards et dépassés ?

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  • Je revoyais récemment l’adaptation japonaise de Tom Sawyer en animation avec mes filles. On était révolté, évidemment, par la très grande violence que le professeur exerce sur les enfants, une violence à la fois physique et morale. Alors je disais à mes filles, voilà, c’était comme ça, l’école, heureusement, les choses ont changé.

    Si on réadaptait Tom Sawyer aujourd’hui, faudrait-il changer le personnage du professeur pour qu’il soit "au goût du jour" ? Pour moi, c’est non. Les histoires peuvent être là pour qu’on puisse se reconnaître, mais elles peuvent aussi être là pour témoigner qu’ailleurs et à une autre époque, c’était différent.

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    • Répondu le 20 avril 2023 à  14:45 :

      Sur ce sujet de "faut-il réécrire les oeuvres en fonction des critères moraux de l’époque ou bien les laisser telles quelles, et éventuellement placer un avertissement au lecteur en préface ?", ça fait 2 fois que j’entends un éditorialiste d’un gros média (RTL) prétendre que Casterman a fait le bon choix en laissant "Tintin au Congo" intact, mais en plaçant un avertissement au lecteur en préface. Interpellé, je suis allé en grandes surfaces feuilleter un exemplaire de Tintin au Congo, en l’occurrence une réimpression très récente (2021), et je n’ai vu aucun avertissement en préface. Quelqu’un peut-il me renseigner au sujet des éditons récentes de cet album et de ce prétendu "avertissement" ?

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    • Répondu le 20 avril 2023 à  15:24 :

      Avant l’adaptation japonaise, il faut lire "The Adventures of Tom Sawyer" de Mark Twain. On comprend mieux ce qu’était le racisme ordinaire du sud des USA en lisant ce monument.

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      • Répondu par denis le 21 avril 2023 à  10:10 :

        Oui, il faut faire confiance en l’intelligence des gens à faire la part des choses entre l’époque passée et l’époque actuelle. Si on édulcore et revisite tout le patrimoine, on ne saura plus d’où l’on vient et comment les mentalités ont évolué en mal ou en bien

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  • "Sauf si on a un éditeur très tâtillon qui arrive à…

    PB : Je n’entends plus très souvent parler d’éditeur qui vienne se mêler du travail de création. Quand je m’adresse à mon éditeur, c’est par exemple pour lui demander de regarder mes 40 pages que je viens de faire. C’est lui qui me dit « tiens, à tel endroit on se fait un peu chier », là je lui dis merci. Parce que c’est moi qui ai demandé. Il n’y a plus beaucoup d’éditeurs qui lisent et qui disent « voilà la liste de ce que j’aimerais que tu changes ». En France ! C’est un truc d’éditeurs français. J’ai bossé avec des éditeurs américains, un peu avec des éditeurs japonais, et j’ai découvert que c’est en France que les éditeurs laissent les auteurs faire ce qu’ils veulent. C’est vraiment un truc de Français. Partout ailleurs, c’est le boss, l’éditeur.

    Comme le producteur de films aux États-Unis…

    PB : Qui a le cut de fin, voire carrément qui te dit « j’aimerais bien que tu me fasses une histoire qui soit pour des gens qui ont à peu près la vingtaine, il faudrait que l’héroïne soit urbaine, on aimerait bien qu’à un moment il y ait un chat – parce que les gens aiment bien les chats ». Et qu’après, l’auteur dit « c’est parti ! ». Il doit y avoir une autre satisfaction à créer des choses dans la contrainte...mais pour un auteur français... Il claque la porte ! Il part avec sa grande écharpe en disant « mais moi je suis un artiste, Monsieur ! » (rires). Cela n’existe pas chez nous, mais dans des pays, c’est comme ça."

    Pénélope a découvert la différence entre notre droit d’auteur et le copyright !

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  • Sur la couverture de son adaptation de "Sacrées Sorcières",
    Le nom de Roald Dahl apparaît en premier en haut de la couverture. Mais c’est une œuvre "d’après Roald Dahl" puisqu’elle a fait disparaître un personnage pour en créer un nouveau.

    C’est un peu comme si je faisais une adaptation de "Les Misérables" et que je supprimais les Thénardier parce que je ne les aima pas pour les rempalcer par des personnages conformes aux goûts du jour des sensitives readers et que je décidais d’écrire en gros caractère gras Victor Hugo. Il ya quelque chose de l’épicerie trompeuse qui me dérange dans cette manière de procéder.

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    • Répondu le 22 avril 2023 à  21:46 :

      Certes mais la plupart des adaptations comportent des trahisons de ce genre. Vous parlez de Victor Hugo, il faudrait revoir tous les films adaptés des Misérables. Plus récemment, rappelez-vous le Tintin de Spielberg, trahison complète du dyptique La Licorne-Rackham Le Rouge.

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      • Répondu le 23 avril 2023 à  10:26 :

        D’où l’importance de préciser "d’après " pour ne pas tromper le client sur la marchandise.

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