En Israël, on est encore #JeSuisCharlie

Le vernissage a eu lieu en présence de SE l’ambassadeur de France en Israël, M. Patrick Maisonnave. il a été suivi d’un débat sur la liberté de la presse satirique en Israël et en France.

Le plateau, animé par Oren Nahari, rassemblait l’illustratrice israélienne Rachel Achunov, les dessinateurs israéliens Uri Fink, Shlomo Katz, Michel Kichka,, Nimrod Reshef et le dessinateur français Eric Laplace alias Placide. Les intervenants israéliens ont exprimé leur profonde admiration et leur amitié pour les dessinateurs de Charlie Hebdo. Placide a partagé ses souvenirs de certains des grands créateurs disparus : "C’étaient des gens très accessibles, très modestes..." dit-il. Loin d’être ses stars des médias.

Le 7 janvier, l’Institut Français de Tel Aviv rendait hommage à Charlie Hebdo

Michel Kichka qui publie aussi bien en Israël qu’en France a évoqué la situation du dessin de presse dans les deux pays, soulignant que dans l’état juif, elle était encore relativement balbutiante. Uri Fink fit observer que les choses évoluaient cependant, par exemple grâce à Facebook, où le partage des dessins joue un grand rôle. Ce genre de média social permet de "sentir" la réaction du public par rapport à un dessin, de se créer une communauté avec laquelle on peut être proche. Nimrod Reshef confirma que la nouvelle génération des artistes israéliens est en effet très présente sur ces nouveaux médias.

À l’Institut Français de Tel Aviv, de gauche à droite, Oren Nahari, l’animateur du débat, Uri Fink, Shlomo Katz, Rachel Achunov, Nimrod Reshef et Michel Kichka.

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Shlomo Katz, le doyen des dessinateurs de presse israéliens et lauréat du prestigieux Prix de la caricature Dosh (le créateur du premier personnage de BD israélien, Srulik Abadi), a mentionné le fait que, de toute sa carrière, il n’a jamais dû corriger un dessin. Ironisant à propos du manque de réaction que suscitent généralement les caricatures dans les journaux israéliens, en comparaison avec le retentissement obtenu par les dessinateurs de presse français, il déclare : "Le jour où en Israël, on tuera pour une caricature, je pourrai me reposer en paix, car ce serait le signe que le message est passé…"

Le dessinateur Placide tenant le dernier numéro de Charlie Hebdo.

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Dessin de Placide. DR.

Les dessinateurs Shay Charka et Uri Fink.

Le caricaturiste Shay Charka, présent dans le public, fit remarquer que rien n’était tabou dans la caricature israélienne et que Dieu lui-même avait fait l’objet d’une représentation dans un programme satirique à la télévision israélienne. Ce n’était pas l’avis du journaliste Natan Zehavi, un des leaders d’opinion de la presse israélienne également présent, qui déclara qu’au contraire, le dessin de presse israélien était d’une faiblesse insigne, n’ayant jamais le courage de critiquer l’extrême droite israélienne qui est le fléau du pays. Michel Kichka temporisa en expliquant que si les caricaturistes israéliens étaient "trop gentils", ce n’était pas par peur des réactions, loin de là, mais parce que la mentalité même de la société israélienne, son éducation, invitait en permanence à la retenue.

L’illustratrice Rachel Achounov a, de son côté, peut-être en réaction à la polémique qui occupe en ce moment le Festival d’Angoulême, rappelé qu’en Israël aussi, la place des femmes est très minoritaire non seulement dans le dessin de presse et l’illustration, mais aussi dans la politique et dans bon nombre d’autres "domaines réservés" aux hommes. Le débat s’est terminé sous les applaudissements.

Ce dessin de Kirschner qui parodie Charlie sous le titre de "Srulik Abadi", le Charlie Brown israélien, représente le prophète Moïse portant les tables de la Loi. Sur celles-ci, l’alphabet, qui rappelle qu’il faut savoir lire avant d’interpréter la parole divine.

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Une expo-hommage

Parallèlement, l’Institut Français accrochait à ses cimaises une trentaine d’illustrations qui rendaient hommage à Charlie Hebdo. Elles ont fait l’objet d’une publication où l’on peut trouver les signatures de Rachel Achunov, Pierre Ballouhey, Yuval Caspi, Shay Charka, Shlomo Cohen, Boris Erenburg, Alain DuBouillon, Uri Fink, Roy Friedler, Yair Garbuz, Nissim Hezkiyau, Avi Katz, Michel Kichka, Eric Laplace, nts ;Moshik Lin, Batti Manfruelli, Laurent Mélikian, Richard Nagy, Didier Pasamonik, Nimrod Reshef, Robert Rousso, Vladik Sandler, Benjamin Wingz, Phil Umbdenstock et Ofer Zanzuri. Nous avons réussi à en obtenir une version PDF que nous vous livrons ici en exclusivité, avec l’accord de l’Ambassade de France et Israël et de l’Institut Français de Tel Aviv.

Autre couverture de Srulik Abadi, par Moshnik cette fois. Allusion au conte "La Princesse et le petit pois", ce qui empêche l’Europe de dormir est un fruit autrement plus inquiétant.

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"Cet événement a été largement relayé dans tous les médias, ici en Israël, témoigne Michel Kichka. Je pense que les Israéliens ont pris la mesure de ce qui s’est passé seulement après les événements du 13 novembre. Là, ils ont compris que la France affrontait une vraie guerre, qui ne concernait pas seulement quelques malheureux dessinateurs, mais une façon de vivre à la française, de même que la laïcité, un concept qui n’est pas bien compris en Israël. Dans mes interventions publiques, j’explique souvent que, dans cette histoire, depuis le début, la caricature n’est qu’un prétexte. Les 130 morts du Bataclan, ceux de l’Hyper Casher, n’avaient pas dessiné Mahomet. On a fait des attentats du 7 janvier une "affaire Charlie Hebdo" alors que c’était l’affaire de la société entière. Quand, à l’Institut Français, un journaliste a fait valoir qu’en Israël, nos caricatures n’étaient pas assez mordantes, qu’elles étaient trop sages, n’osant pas assez attaquer l’extrême-droite, ni critiquer les exactions faites aux Palestiniens, je ne pouvais qu’être d’accord avec cette position."

Le catalogue "Après-Charlie" édité par l’Institut Français de Tel Aviv en association avec L’Association des desssinateurs de presse israéliens.

Avec l’aimable autorisation de L’Institut Français de Tel Aviv